Panama sous pression : État d’urgence après des grèves massives chez Chiquita – 5 000 travailleurs licenciés

Bocas del Toro, Panama – 29 mai 2025

Le gouvernement panaméen a déclaré l’état d’urgence dans la province occidentale de Bocas del Toro, l’une des plus importantes régions agricoles du pays. Cette décision fait suite à une vague sans précédent d’arrêts de travail et de manifestations, principalement dirigée contre un projet de réforme du système de sécurité sociale, qui a récemment connu une escalade spectaculaire. Particulièrement touchée : la production de bananes Chiquita, mondialement connue et qui joue un rôle prépondérant dans la région.

Déclencheur : Le projet de réforme des retraites rencontre une résistance massive

Depuis fin avril, des milliers de travailleurs, de syndicalistes et d’organisations autochtones du Panama protestent contre une réforme sociale initiée par le président José Raúl Mulino. Parmi les éléments clés de cette réforme figurent le relèvement de l’âge de la retraite, la privatisation partielle des prestations sociales et une restructuration complète du système public de sécurité sociale. Les projets de réforme ont suscité l’incompréhension et la résistance d’une grande partie de la population, perçus comme antisociaux et résolument favorables aux entreprises.

Ce qui avait commencé comme une manifestation syndicale nationale s’est rapidement propagé aux travailleurs des vastes plantations de bananes de Bocas del Toro, une région économiquement fortement dépendante des exportations agricoles. Nombre de ces travailleurs sont désormais confrontés à une double menace : l’incertitude économique et la pression gouvernementale.

Chiquita licencie 5 000 travailleurs – Les syndicats parlent d’intimidation

Les actions de Chiquita Panama, filiale de l’entreprise américaine Chiquita Brands International, considérée comme l’un des plus grands exportateurs de bananes au monde, sont particulièrement controversées. La semaine dernière, l’entreprise a annoncé le licenciement immédiat d’environ 5 000 travailleurs ayant participé aux grèves. Dans un communiqué officiel, Chiquita a qualifié les manifestations d’« injustifiées » et a justifié ces licenciements par des préjudices économiques et une « violation des obligations contractuelles ».

Les syndicats et les représentants des travailleurs accusent cependant Chiquita de ces licenciements, les qualifiant de tentative d’intimidation visant à briser la résistance dans la région. Certains militants font état d’une pression massive de la part des autorités locales et de l’entreprise elle-même. Des vidéos circulent sur les réseaux sociaux montrant les forces de sécurité pénétrer dans les plantations et expulser les travailleurs.

Le gouvernement réagit par l’état d’urgence – Arrestations de dirigeants syndicaux

Le gouvernement Mulino a réagi par une mesure drastique : l’état d’urgence pour toute la province de Bocas del Toro. Cette mesure permet aux autorités, entre autres, de restreindre les rassemblements, d’imposer des couvre-feux, de surveiller les canaux de communication et d’intervenir rapidement auprès de la police. L’objectif officiel est de protéger « la sécurité, la santé et le bien-être de la population ».

Mais les réactions ne se font pas attendre. Plusieurs dirigeants syndicaux ont été arrêtés ou se sont cachés ; selon des informations locales, certains auraient déjà quitté le pays. Les organisations de défense des droits humains expriment leur inquiétude face à la brutalité des forces de sécurité et mettent en garde contre une « escalade autoritaire » de la situation politique intérieure au Panama.

Les mouvements autochtones et la société civile critiquent également l’accord américain.

Outre la réforme des retraites, un accord de sécurité signé entre les États-Unis et le Panama en avril suscite également des troubles. Cet accord prévoit une coopération plus étroite dans la lutte contre le trafic de drogue et l’immigration clandestine. Ses détracteurs craignent toutefois qu’il ne restreigne également la liberté de circulation de la population et n’entraîne une militarisation accrue des territoires autochtones.

Le mouvement autochtone de Bocas del Toro – dont de nombreux membres travaillent également dans les plantations – considère cet accord comme une nouvelle forme de contrôle externe et critique l’influence indirecte des États-Unis sur la politique intérieure panaméenne par le biais des structures de sécurité. « Nous subissons des pressions de toutes parts », a déclaré un porte-parole du mouvement aux médias locaux.

Répercussions internationales – et possibles goulets d’étranglement de l’approvisionnement ?

Les grèves et la dégradation de la situation pourraient également affecter les chaînes d’approvisionnement internationales. Chiquita approvisionne des supermarchés du monde entier, notamment de nombreuses grandes chaînes en Allemagne. Rien n’indique actuellement de graves goulots d’étranglement de l’approvisionnement, mais les experts du secteur suivent la situation de près. Si la situation à Bocas del Toro s’aggrave, des retards dans les livraisons de bananes pourraient également affecter les marchés européens.

Conclusion : La crise s’étend

Ce qui a commencé comme une manifestation contre une réforme impopulaire des retraites se transforme progressivement en une crise politique intérieure aux implications internationales. L’état d’urgence, les licenciements massifs et la polarisation de la société mettent en lumière la fragilité de la situation sociale au Panama, ainsi que les rapports de force au sein d’un système où s’affrontent entreprises internationales, intérêts nationaux et mouvements sociaux.

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